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Droit social

Titres restaurant et télétravail

Sandrine Poncet
Avocat Associé

Depuis plusieurs mois, les entreprises font face à la délicate question du maintien des titres restaurant aux salariés en télétravail.

Le gouvernement s’était clairement positionné, dans ses questions/réponses, pour leur maintien de plein droit.

Cette position était toutefois moins guidée par des aspects légaux que par la volonté affichée de l’Etat, de ne pas pénaliser financièrement les télétravailleurs. En effet, en dépit de la qualification juridique retenue pour ces titres, pour bon nombre de salariés, ils constituent une source de revenu complémentaire. En priver les télétravailleurs, aurait certainement conduit à des demandes massives de retour sur site, non souhaitées en cette période de crise sanitaire.. Cette position juridiquement contestable a été adoptée par l’URSSAF, qui a indiqué maintenir les exonérations pour les titres-restaurant remis aux télétravailleurs.

Fort de ce constat, le syndicat UNSA a assigné le Groupe MALAKOFF par-devant le Tribunal Judiciaire de Nanterre, aux fins de voir ce dernier, condamner à remettre les titres restaurant aux salariés placés en télétravail. Avantage, dont ils étaient privés depuis mars 2020, sur décision de la Direction.

Le Tribunal Judiciaire de Nanterre , dans un jugement audacieux en date du 11 mars dernier, a donné raison à l’employeur, en jugeant qu’il n’y avait pas un droit acquis, pour les télétravailleurs au maintien des titres restaurant et que le fait, de réserver le bénéfice de ces titres aux salariés intervenant sur site, ne créait pas une discrimination puisque les salariés n’étaient pas placés dans une situation identique.

Le Tribunal, par un raisonnement fort logique, revient sur l’objet même du titre restaurant, qui est de compenser les dépenses supplémentaires supportées par les salariés, ne pouvant pas, rentrer déjeuner chez eux. Or en cas de télétravail, le salarié ne supporte aucun surcoût puisqu’il déjeune à son domicile. La situation étant objectivement différente, le traitement peut aussi être différent.

Ce jugement rappelle à juste titre que le titre restaurant est une participation aux frais de repas que doivent exposer les salariés ne rentrant pas déjeuner à domicile et non pas un complément de rémunération.

Cette décision n’est pour le moment pas définitive et il est fort probable que le syndicat formera un appel. Il sera intéressant de connaitre la position qu’adoptera la très influente Cour d’Appel de Versailles, dans ce dossier et de voir notamment si elle se rangera au côté de la Cour d’Appel de RIOM qui en 2018 avait adopté une position identique à celle des juges de Nanterre sans que cela n’entraine à l’époque beaucoup de commentaires. Mais on était, à l’époque, loin du recours massif au télétravail…