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Droit socialIndémnisation pertes d'exploitation

Vers une indemnisation des pertes d’exploitation dues au confinement ?

Par 31 juillet 2020Pas de commentaires

La décision du Tribunal de commerce de Paris rendue le 22 mai 2020, a suscité un grand espoir chez de nombreux restaurateurs lourdement impactés par la pandémie du covid-19 ayant entrainé leur fermeture.

En effet, le Tribunal a condamné l’assureur AXA France à verser au restaurateur parisien Stéphane Manigold une provision de 45 000€ au titre des pertes d’exploitation subies suite à la fermeture de son établissement liée à la crise sanitaire du covid-19.

Cette décision a ainsi ouvert la voie à de nombreuses procédures en référés engagées par les restaurateurs à l’encontre de leurs assureurs en vue d’obtenir également indemnisation de leur perte d’exploitation.

Néanmoins, cette première victoire reste à nuancer. La police d’assurance souscrite par le restaurateur parisien prévoyait « une extension pour les pertes d’exploitation en cas de fermeture administrative imposée par les services de police ou d’hygiène ou de sécurité » et ne comportait aucune clause d’exclusion.

Or selon l’assureur AXA, ce type de contrat ne représenterait que 1% des affaires de pertes d’exploitation. De plus, selon un communiqué de presse publié par l’ARCP le 23 juin 2020, 93,3% des contrats de dommages comportant une garantie « pertes d’exploitation » ne couvrent pas l’évènement du Covid-19, et 4,1% de ces contrats présentent une couverture incertaine.

Le juge des référés du tribunal de commerce de Lyon ainsi que celui du tribunal de commerce de Bordeaux, tous deux saisis pour des affaires similaires, se sont déclarés incompétents pour allouer une provision. Ce dernier a cependant ordonné une expertise du montant des pertes d’exploitation.

Dans l’affaire soumise au Tribunal de commerce de Bordeaux, alors que les restaurateurs se pensaient couverts par leur contrat « multirisque professionnel » assurant la perte d’exploitation en cas de « fermeture administrative […] conséquence d’une maladie contagieuse, d’un meurtre, d’un suicide, d’une épidémie ou d’une intoxication » ils se sont vus opposer une clause d’exclusion disposant que : « Sont exclus les pertes d’exploitation, lorsque a la date de la décision de fermeture, au moins un autre établissement, quelle que soit sa nature et son activité, fait l’objet, sur le même territoire départemental que celui de l’établissement assuré, d’une mesure de fermeture administrative, pour une cause identique. »

Dans cette affaire, la défense d’AXA reposait essentiellement sur l’ambivalence de la notion de « fermeture administrative ». L’assureur soutient qu’il couvre la fermeture de l’établissement mais pas lorsque tous les autres établissements sont fermés, auquel cas cela reviendrait à couvrir le risque systémique.

L’avocat du restaurateur souligne quant à lui le caractère général d’une épidémie et dénonce la clause d’exclusion comme une clause abusive ayant « pour effet de vider la garantie de sa substance ».

En tout état de cause, dans l’affaire AXA contre MANIGOLD le débat sur le caractère assurable d’une pandémie a été rejeté par le Tribunal de Commerce de Paris. Aussi cette décision est à relativiser, elle n’a pas de véritable portée générale. D’une part parce-que cette décision rendue en référé est d’exécution provisoire, mais n’a pas l’autorité de la chose jugée. D’autre part, parce-que peu de contrats souscrits indemnisent la pandémie et/ou l’épidémie sans clause d’exclusion.

Enfin, plutôt que de faire appel, AXA a choisi de transiger et les parties ont donc convenus d’un accord.

Sources :https://france3-regions.francetvinfo.fr/nouvelle-aquitaine/gironde/bordeaux/aldo-vs-axa-tribunal-commerce-bordeaux-ordonne-expertise-1845056.html

https://acpr.banque-france.fr/sites/default/files/medias/documents/20200623_communique_presse_pertes_exploitation.pdf